jeudi 8 mars 2007

Un idéal de rassemblement

J'aimerais rappeler que début janvier, Dominique de Villepin tenait, lors de l’émission « Dimanche+ », ces propos plutôt enthousiasmants, et très pertinents sur la prochaine échéance :

Laurence Ferrari : La campagne électorale, est-ce que tout est joué maintenant, à quatre mois des présidentielles, à votre avis ?

Dominique de Villepin : Vous savez, une campagne électorale, c’est le choix des Français, donc par définition, rien n’est joué jusqu’au moment de l’élection. Et je pense que ce serait une gigantesque erreur que d’imaginer que tout est joué. Au contraire, nous sommes loin du compte, et c’est le message que je donne à ma famille politique. Donc, créons la dyn
amique des volontés, créons la coalition des ambitions, qui permette véritablement d’arriver et de répondre aux attentes des Français. Ça demande beaucoup d’efforts. Vous savez, moi, en politique, et en particulier dans les présidentielles, j’ai un petit peu d’expérience, je ne connais pas la machine à perdre, dont certains parlent. La machine à perdre, c’est une invention des perdants, qui veulent trouver des boucs émissaires. Mais par contre, je sais ce que c’est qu’une machine à gagner. Et la machine à gagner, ça commence par la transformation et la métamorphose d’un candidat, qui devient le choix des Français. Et qu’est-ce qui s’est passé en 95, comme en 2002, même si le parcours a été un peu singulier ? C’est que, jour après jour, Jacques Chirac s’est agrandi, s’est élargi, de cette ambition française. Il a épousé véritablement la fonction qui était la sienne. Et rappelez-vous, en 95, avec une véritable dynamique : Madelin, Jean-Louis Debré, Alain Juppé, Philippe Seguin, des personnalités fortes, qui à aucun moment ne se sont reniées, mais qui ont mis tout leur poids dans la bataille. Aujourd’hui, c’est vrai que j’estime qu’il y a encore un élan à donner. Quand je vois quelqu’un comme Jean-Louis Borloo, avec le bilan qui est le sien, l’action qu’il a menée, le tempérament qui est le sien ; quand je vois...


LF : Il pourrait faire un bon candidat ?

DDV : Mais, Jean-Louis Borloo a quelque chose d’essentiel à dire, pour la campagne à droite des présidentielles. Donc ça, ça doit faire partie de cette dynamique. Je parlais de coalition des volontés ; c’est véritablement le trajet qui doit être emprunté. Michèle Alliot-Marie, elle a réussi une grande réforme : la professionnalisation des armées. Eh bien, que tout ça soit conjugué, que tout ça soit mis ensemble. Vous savez, si on veut aligner une famille politique, réduit derrière un candidat, sous forme de petits pois ou comme les sardines dans une boîte, vous ne gagnez pas comme ça. Ne l’oublions pas : une élection, ce n’est pas de la simple arithmétique. Aujourd’hui, il n’y a pas de candidat en France qui puisse, sur son nom, l’emporter. C’est dire qu’il va falloir faire un travail énorme pour arriver à avoir 50 % plus une voix - sauf à penser qu’on peut élire un candidat par défaut. Personne ne passe aujourd’hui spontanément cette barre. Sauf de façon arithmétique. Donc ça veut dire qu’il faut additionner des forces, additionner des idées, conjuguer des visions. Moi j’aurai l’occasion, en toute liberté, de faire des propositions pour notre pays - il est bien normal, comme chef du gouvernement, que je fasse part de la vision, des propositions qui sont les miennes. Mais je crois qu’il faut être dans un esprit qui ne soit pas un esprit réducteur. Il faut être généreux, il faut être fraternel. C’est d’abord vrai au sein de notre propre famille, et c’est comme ça que nous gagnerons.


Cette analyse conserve toute son actualité. On observe, au reste, que cette dynamique n’est toujours pas enclenchée, et ne le sera vraisemblablement jamais, autour du candidat de l’UMP, qui ne génère aucune émulation entre lui et le rang serré de ses «soutiens» et autres courtisans. Cette constatation est tout à fait cohérente par rapport à la volonté constante, exprimée par Nicolas Sarkozy, d’apparaître comme un homme providentiel qui ferait à lui seul la synthèse de tous les courants de son parti, et même au-delà. Sa démarche n’est ni généreuse, ni fraternelle : elle répond avant tout à une ambition personnelle dévorante, qui ne s’accompagne, dans son cas, absolument pas des qualités requises pour passer de la dimension de politicien, - ce qu’il a toujours été, au mauvais sens du terme, - à celle d’homme d’État.

Dans cette interview, Dominique de Villepin cultivait sa différence de façon tout à fait intelligente, et critiquait très subtilement ce qui prévalait autour du président de l’UMP. On ne peut que regretter qu’il n’ait pas continué à exprimer clairement ses antagonismes et assumer ses divergences, en préférant se mettre en retrait pour, au final, avec un mélange d'amertume et de résignation, ne pas créer les conditions d’une candidature.

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